Werner LAMBERSY : Gratte-pieds de Bruxelles, Photographies de Didier Serplet, postface de Catherine Gerbot, « Regards sur la ville » / CFC éditions, 14 place des Martyrs – 1000 Bruxelles. Distribution pour la France : éd. J.-M. Place, 3 rue Lhomond – 75005 Paris; 72 pages – 18 €)

Sur 72 pages et dans un format 20,5 x 32,5, ce superbe volume présente 35 photographies couleur signées Didier Serplet dans le cadre du petit patrimoine architectural des paysages urbains de la ville de Bruxelles. Le poète Werner Lambersy pose sur ces clichés le regard complice d’un artiste curieux du monde qui l’entoure et des traces secrètes des mœurs d’antan. Ces bouches d’ombre témoignent en effet d’une façon de vivre point si lointaine où l’on se présentait, chez les hôtes d’un jour, débarrassé de la boue de la grande ville. Aujourd’hui que tout est asphalte, les gratte-pieds, dérisoires cavernes en miniature, offrent leur mystère aux seuls poètes du regard et aux curieux qui savent déceler, dans les vestiges du souvenir, les traces d’une civilisation où l’on respectait encore autrui en l’honorant d’un aspect physique convenable. « On a repeint un peu on a gratté désherbé puis on a renoncé pour oublier finalement comme on oublie un puits sans eau une cheminée sans feu une âme sans rêves ou un cœur sans passion ». Werner Lambersy donne à cet ensemble le crédit de sa sensibilité et les atouts majeurs de sa culture. Chaque image est traitée avec cette audace « bon enfant » et ce sens de l’analyse qui le caractérisent. Œuvre salubre que font ici Didier Serplet et Werner Lambersy en posant un regard amusé et quasi sensuel sur cette architecture à la fois populaire par sa proximité et sophistiquée par sa structure inventive. A n’en pas douter, « Gratte-pieds de Bruxelles » est un livre qu’aurait aimé Prévert.

©Jean Chatard

Note de lecture in Les Hommes sans épaules, n° 23/24, année 2007.