Yves MAZAGRE, La Lutte finale, introduction de Gilles Lapouge (Librairie-Galerie Racine, 2010, 15 €).

Yves Mazagre a ouvert la voie au poème d’aventures. Le lecteur participe avec lui à une chasse au trésor où le moindre brin d’herbe a le rôle principal, où chaque mot nous tient en haleine, où les anciens dieux sont ressuscités pour nous faire vivre les exploits et les défaites du vivant, avec un désespoir en liesse et une extraordinaire sensualité. Ses textes se dégustent à la manière d’un thriller d’un genre nouveau ; ils en combinent les ingrédients en jonglant avec les paradoxes, l’humour, l’Histoire, la science et l’érotisme. Ils expriment les facettes mystérieuses d’un monde intense – notre planète, telle que nous ne l’avions jamais vue –, assujetti aux claquements de doigts d’un rêve grouillant de désirs. Loin de ces poèmes arrêtés où l’or est osé et la rose rossée, Yves Mazagre nous fait jubiler en surprenant toujours. Il s’inscrit comme une sorte d’Homère contemporain, de ces auteurs rares qui ont le pouvoir de jeter du feu sur notre myopie.

De mes yeux provisoires, je regarde ma naissance et l’obscène beauté de ce paysage où le pire est certain

Eden cruel qui n’est pas le jardin de la source où je puise ma vie

Y grandissent des arbres angoissés aux feuilles vastes comme des voiles
Et les mancenilliers évaporent leur poison
Pire que le sang des massacres
Que ce déchirant hôpital où nous nous étripons où même la torture est dénaturée
Pire que le pire
J’aperçois l’indifférence de la nuit qui s’avance

Expliquez-moi pourquoi si souvent je jubile

©Alain Breton

(Note de lecture in revue Les Hommes sans épaules, n° 31, premier semestre 2011)