Car j’ai affaire en ce pays, Jean Zimmermann, Fédérop.

La force de Jean Zimmermann, dont on connaît par ailleurs la qualité d’écriture, réside essentiellement dans un lyrisme que l’on ne rencontre plus guère aujourd’hui, lyrisme d’autant plus efficace qu’il se double d’une connaissance approfondie des troubadours et de l’Occitanie dans son ensemble. Plusieurs ouvrages, conférences et pièces de théâtre en témoignent, cet homme de la terre et du soleil, cet homme à la sensualité exacerbée, amoureux inconditionnel des Corbières a, de propos délibéré, déplacé ses racines afin de s’implanter en pays occitan. Épreuve initiatique en quelque sorte. Jean Zimmermann « gagne » son Occitanie comme d’autres gagnent leur pain : volonté farouche de prendre pied sur la terre élue.

Cette démarche essentielle a quelque chose de vivifiant et de candide qui force l’admiration. Dans ce pays qu’il s’est choisi parce que poétique, Zim respire mieux, aime mieux. Il concrétise sa jubilation par une lettre qui affirme, dès la première page : « Je vous écris parce que vous êtes loin, là-bas, de l’autre côté des prairies, des collines, de l’autre côté de l’horizon, là-bas, plus loin que les nuages qui déferlent jusqu’au fond de mon silence. Tout au fond qui déferlent. »

Trop de poètes d’aujourd’hui (méconnaissance ou étroitesse de sentiments) oublient que le lyrisme fait partie intégrante de la poésie de chez nous. Jean Zimmermann, lui, s’y abreuve.

Car j’ai affaire en ce pays est un chant profond à la gloire de cette terre occitane qu’il a fait sienne. Chaque marin, après avoir bourlingué, « pose son sac » en un lieu de prédilection. Il en va de même pour Jean Zimmermann qui offre tout son bagage poétique à la terre des Corbières, aux sentiers des Corbières, aux odeurs et aux bruits des Corbières, aux hommes et aux femmes des Corbières.

Le geste, symbolique et émouvant, est en réalité l’aboutissement d’une démarche entreprise depuis longtemps déjà et qui se concrétise dans ce livre de haute volée par le lyrisme du coeur et celui de l’esprit. « Écoute le chat fou le vent fou / Qui vient violeur sur les collines / Qui va qui vient qui danse et chante // Je vais je viens je danse et chante / Je suis ici et je suis là »

©Jean Chatard

Note de lecture in Le Mensuel littéraire et poétique, n° 348, mars 2007