Claude Held, dont c’est ici le deuxième rendez-vous avec Goya (cf. Rencontre avec Goya : les Caprices, La Bartavelle, 1993), nous conduit pas à pas dans la suite célèbre des Désastres de la guerre. Chaque pièce conserve le titre de l’eau-forte qui lui correspond et elle est précédée de quelques lignes resituant très sobrement dans la mémoire la vision du graveur, en lui conférant ainsi, avec mystère, plus de présence et de grâce efficace qu’une reproduction de livre d’art.
Quant au poème de Claude Held – en aucune façon la paraphrase des gravures –, il opère en nous comme révélateur du climat incomparable de ces hallucinants chefs-d’œuvre, et toujours avec une économie de moyens tout à fait digne du haut modèle pictural fréquenté. Comme l’observe l’auteur lui-même dans une prose liminaire, le texte poétique n’est là, tout comme l’image originelle, que pour être débordé par le réel, au sein duquel il œuvre en déplaçant des jeux de miroirs. Travail autonome de vraie poésie, sans nul souci de se faire valoriser par son référent : approche modeste, respectueuse, fidèle.
©Paul Farellier
(Note de lecture in Les Hommes sans épaules, n° 5, 4ème trimestre 1998)