Paul Farellier : Parlant bas sur ciel – l’Arbre à paroles, 50, Grand Route, BP 12, 4540 Amay, Belgique.

L’œuvre du poète et critique (il est membre du comité de rédaction de la revue Les Hommes sans épaules) Paul Farellier (né en 1934) est née d’une longue et très exigeante gestation. Ce n’est que vers la cinquantaine, en 1984, qu’il publie L’Intempérie douce, son premier recueil, au prestigieux Pont de l’Épée de Guy Chambelland. Suivront (chez le même éditeur) : L’Île-cicatrice (1987) et Une main si simple (1989), puis : Où la lumière s’abrège (La Bartavelle, 1993), À l’obscur et au vent (L’Harmattan, 1996), et (aux éditions de l’Arbre à paroles) la trilogie qui marque le pic de l’œuvre : Dans la nuit passante (2000), Tes rives finir (2004), Parlant bas sur ciel (2004). En vingt ans, parallèlement à son travail de critique, Paul Farellier aurait pu donner quinze ou vingt recueils ; il en donnera huit. Farellier a la redite comme le principe de l’écriture pour l’écriture en horreur, et il a raison. Il y a chez Farellier une exigence dans l’écriture, une haute opinion de la création poétique qui nous éloigne du jeu verbal, ainsi qu’une quête de l’être et de ses abîmes qui demeure sans complaisance : Cette vie à mourir, – ne la balance pas d’un coup d’épaule, – tiens-en le fardeau. Proche d’Yves Bonnefoy ou de Philippe Jaccottet, mais davantage poignante et en contact avec la vie, la poésie de Farellier est – au premier abord – une musique mezza voce, qui évoque les mouvements de l’âme, l’émotion vive, décryptée, y compris, dans ce qu’il peut y avoir au premier abord de plus simple, sur la pointe des arbres doucement agitée par le demi jour. La générosité côtoie l’angoisse, la mort, la solitude et l’émerveillement. L’interrogation est perpétuelle, l’image concise, le verbe ciselé au plus près du vrai et du vécu. Cette poésie épurée en dit long sur le fatum humain : Maintenant, – visage fixé : – un presque sourire – où se découd la naissance – avec le rien de personne, – apaisé peut être d’un sens. Ce dernier recueil est une ode au père. La mort est un gouffre que surplombe le fil de rasoir de la vie.

©Christophe Dauphin

(Note de lecture in revue Supérieur Inconnu, nouvelle série, n° 2, juillet-décembre 2005)