Cet ouvrage est un diptyque où la parole proprement poétique (page de droite) est accompagnée d’un « journal », d’un commentaire tantôt allusif, tantôt discursif (page de gauche). Ces deux sources, par leur décalage même, accentuent la force du propos. Force qui est le corollaire d’un défi prenant Don Quichotte pour emblème : c’est lui qui voit et pratique le vrai, c’est lui le vrai poète.
L’Odyssée du regard (les Grecs sont souvent invoqués), s’il s’appuie sur les hautes, granitiques et ancestrales terres lozériennes, est aimanté par miroitement sable-eau-mer de la Méditerranée. Et Chantal DANJOU s’interroge sur son propre regard, sur sa myopie, sur une gêne visuelle qui fait de chaque instant une aventure de la perception, une première –et poétique – déformation.
Chantal DANJOU se sent liée avec l’absolu, avec « les perdrix / qui plongent l’une vers l’autre / jusqu’à étreindre la mort », mais aussi avec la vigueur (« le fusil vert des arbres »), la grâce inspirée : « la ballerine se recompose / à volonté ».
Cette symphonie « des pays qui respirent dans une flûte de Pan », des pays souvent revus à travers le prisme du voyage en train, cet élan
à garder le cap s’affermit dans un dialogue amoureux, fusionnel, se trouve un visage de passion, comme la rencontre de l’eau et du soleil, ou palpiterait
« un faisceau de veines / dans le corps géant de la lumière ».
©Gilles Lades
in revue Friches, n°52, hiver 1995-1996.