Jean L’ANSELME : Con comme la lune (2007, Rougerie, 87330 Mortemart, 14 €.)

Jean L’Anselme, notre « bête de somme en quelque sorte, aussi fière d’être picarde qu’un bœuf est fier d’être bourguignon », nous donne une nouvelle salve cuisinée à sa façon. Les poèmes de L’Anselme, par leur « naïvisme », comme l’a écrit Jean Rousselot, mais aussi leur humour sarcastique, goguenard, jaune, noir, jovial, sont comme des équivalences des tableaux et dessins de Dubuffet. Dans son œuvre, le poète recherche « la beauté de l’inutile » et aligne, c’est le cas avec Con comme la lune, les calembours, les aphorismes, les ready-made. L’Anselme a ainsi évolué de « l’Art maigre », à « l’Art moche », en passant par « l’Art chouette » et « l’Art triste », pour aboutir aux « poèmes cons », dont précisément Con comme la lune est à coup sûr l’aboutissement. Chez L’Anselme, la poésie, dont l’humour est l’épice savoureuse, la couleur dominante, s’apparente à l’insolite, au bizarre, à l’étrange, à l’inhabituel, l’inattendu. Observateur ironique des êtres et de son temps, L’Anselme aime la truculence, l’invention verbale populaire. Il entend lutter contre la bêtise et le conformisme ambiants, sans jamais perdre son sens de l’autodérision : « Monsieur L’Anselme – à vouloir amuser – toutes vos plaisanteries – au lieu que l’on en rie – on s’en passe lassé ».

©Karel Hadek

(Note de lecture in revue Les Hommes sans épaules, n° 25, 1er semestre 2008)

Chantal LAINÉ : Incendies du brouillard – Librairie-Galerie Racine, 2007

Les poèmes de Chantal Lainé sont des « paquets lourds de choses légères », pour reprendre l’heureuse expression de Cocteau, qualifiant ainsi la neige, dans Les Enfants terribles.

La palette de l’auteur se compose des vocables : cendre, brume, brouillard, ombre, écume, océan, nuages, vent, vagues, fumée, rivage, miroirs, sable… et ces mots reviennent inlassablement, tissant un décor flou, entre rêve et réalité, où, dans une sorte de sfumato à la Turner, le poète déroule sa pensée et nous révèle ses sensations et sentiments. Au centre, vraisemblablement la perte d’un être cher dont le souvenir, par bribes, est évoqué et se confond avec le surgissement et l’évanouissement du poème sur la page : « C’est un vaste reflet / Blanc de toute inscription / Le tombeau d’une image sur l’eau bleue / Un regard s’élève vers lui / Le suit et l’abandonne / D’autres morts apparaissent / Bientôt le courant / Emporte les écumes / Échappées des fonds marins / Un reste de fumée / À la surface de l’océan / Tout s’envole avec le vent ». Certes, la douleur de cette disparition, dont il est fait état en maints poèmes plaque ses accords dans les graves : « Le monde est noir / Sous un soleil blanc / Et dans la brûlure pâle des couleurs / Le soir prolonge son ombre / Il s’achève et sombre / À la surface de ton regard / sans avoir révélé / Un seul souffle de douleur », mais cette douleur, pour présente qu’elle soit, se veut aussi dépassement par le verbe, ce qu’annonce le premier texte : « La feuille est blanche je la vois / Remplie de mots évanescents / Dont je suis la cendre éparse / Les points sont des pas que je dépasse / Chaque lettre est un monde / Qui n’existe pas ». Le concret et l’abstrait, la matière et l’esprit, le réel et l’imaginaire s’entrecroisent, flottent un instant à fleur de page et s’évanouissent, ne nous laissant que ce goût de l’éphémère, celui-là même de notre existence.

Si ce premier recueil de Chantal Lainé contient quelques faiblesses, dont le recours, un peu trop fréquent par exemple, au mot « étoile », cela est véniel en regard de belles réussites comme : « Le visage des astres lointains / Porte la blessure des glaces / La lumière des idées / Et les parfums inconnus de la mort » ou : « Tes yeux se ferment / devant le monde qui scintille / Et l’oubli / Où tu t’endors / Traverse ton dernier regard ». Cette contraction dans le dire, proche du haïku, atteste d’une maîtrise prometteuse.

©Jacques Taurand

(Note de lecture in revue Les Hommes sans épaules, n° 25, 1er semestre 2008)

Monique W. LABIDOIRE : S’aventurer avec Guillevic et neuf poètes contemporains – Éditinter, 2006 – 18 €.

Le titre de cet essai est éloquent. Toute approche de la création d’un poète est une aventure. Monique Labidoire a choisi de se hasarder dans la voie qui conduit aux neuf poètes que sont : Marc Alyn, Marie-Claire Bancquart, Serge Brindeau, Andrée Chédid, Charles Dobzynski, Alain Duault, Daniel Leduc, Bernard Vargaftig et Serge Wellens, en se référant à l’œuvre éclairante – à la fois novatrice et fondatrice – de Guillevic. L’aventure de Guillevic est en effet celle d’un engagement total dans la vie, elle est l’aventure d’un poète bâtisseur d’avenir qui a pris à bras-le-corps la matière généreuse et souvent ingrate de l’existence, l’incorporant à sa propre création, la pétrissant, faisant ainsi lever cette nouvelle pâte humaine pour obtenir ce pain de poésie qu’il nous a donné en fraternel partage.

Dans son Liminaire, Monique Labidoire nous explique : « Je veux parler d’une certaine perception du fait poétique transmis par Guillevic que j’ai eu la chance de connaître en poésie et en affection pendant plus de trente ans. » Elle met ensuite en lumière les correspondances qui s’établissent entre la démarche poétique de l’auteur de Terraqué et celle des poètes appréhendés : « L’un sculpte le silence, l’autre habite le poème, jusqu’au tremblement de la terre. L’une adresse des messages d’espoir et persévère dans sa confiance en l’humanité tandis que l’autre bouscule la petite musique de la poésie pour nous faire entrer dans une vérité qui nous dérange. » Ce qui retient le lecteur dans cette circumambulation autour de la poésie qui prend, tour à
tour, le visage de chaque auteur, c’est la finesse d’analyse de Monique Labidoire, le don de la formule qui condense en quelques mots l’essentiel de l’art de ces neuf poètes, c’est son aptitude empathique – autant de qualités qu’il faut mettre à son crédit. Cette vivante étude, grâce à la clef guillevicienne et au doigté de son auteur, nous permet d’approcher le Saint des Saints de chaque poète et nous communique incontestablement l’envie de pénétrer plus profondément les œuvres évoquées.

Si tel est l’objectif majeur que s’est fixé Monique Labidoire, sans nul doute elle l’a atteint.

©Jacques Taurand

(Note de lecture in revue Les Hommes sans épaules, n° 25, 1er semestre 2008)

Jean-Pierre LASSALLE : Les petites Seymour (« Encres blanches » / Encres Vives)

Après lecture de ce nouvel ouvrage de Jean-Pierre Lassalle, on s’interroge sur le qualificatif à employer à son propos tant les textes déconcertent par leur originalité féconde. Bien sûr on pense au Surréalisme, mais tout autant à l’humour.

« Dans les brouillards de Londres
Je cherche un gant le gant fringant
d’un intrigant
Je cherche un gant tout blanc
d’Hingant de la Tiemblais
Au cœur des blés dans les remblais
Le gant d’Hingant de la Tiemblais.
»

La poésie de Jean-Pierre Lassalle est le royaume du jeu de mot, le royaume de l’absurde qui se révèle à l’analyse plus logique qu’il y paraît au prime abord. Des mots assemblés, des mots détournés, des mots décortiqués agitent le propos intense du poème, et c’est un festival d’inventions, d’étranges rapprochements entre les thèmes soudainement pris au piège de la syntaxe.

La quatrième de couverture évoque une « errance dans le temps », mais il existe aussi une « errance dans les mots ».

« Laissant une invisible mue / séchée sur les calcites qu’un simple papillon bleu des Causses / renverra au néant d’un soupir d’aile. »

Jean-Pierre Lassalle, avec Les petites Seymour (dont la couverture est signée Silvaine Arabo) donne à l’imaginaire l’occasion de se manifester une nouvelle fois dans le sillage d’un Surréalisme inspiré.

©Jean Chatard

(Note de lecture in revue Les Hommes sans épaules, n° 25, 1er semestre 2008)

Béatrice LIBERT: ÊTRE AU MONDE. Éditions de la Différence, 14 euros.

Être au monde rassemble cinq recueils, publiés de 1996 à 2000. L’ordre adopté dans ce livre, pour ne pas être chronologique, n’en fait que mieux surgir le sens latent.

Dans Prière pour le millénaire, Béatrice Libert pousse à bout la volonté de se délivrer des « antiques verrous ». Elle y célèbre la joie, celle qui est une initiation à la vraie naissance. Les poèmes de Contre la nuit traduisent une vivacité spirituelle irrépressible. La sève du poème réconcilie l’âpreté de l’instinct de vie et le sens aérien de la liberté :

« soif ô soif
en ton aride éternité emporte-moi
».

Au long de L’obscur boit l’obscur, le poème s’égale à une sérénité méditative, aux résonances du lieu de la vie :

« le silence à soi seul est maison ».

La coïncidence avec soi s’enrichit de la volupté des harmoniques. Parfois, même, la dépossession aboutit à l’effusion cosmique :

« celle qui respire est la mer ».

Au feu recréateur des poèmes de L’heure blanche, la célébration multiplie ses angles, intensifie ses ancrages sensibles, au point de faire de celle qui écrit « une grande carnassière de l’immédiat ».

Dans Deux enfances, enfin, l’évocation de l’amour maternel lui permet de mêler la félicité du sentiment océanique au « vertige de nos existences mêlées ».

Dans la poésie de Béatrice Libert, la parole court, comme l’air et l’eau, comme le sang, comme une foulée légère. Jubilation d’autant plus précieuse qu’elle connaît l’envers de la joie. De poème en poème se crée une demeure immatérielle, « comme un berceau parfait jusqu’à la tombe ».

©Gilles Lades

in revue Friches, n° 89, hiver 2004-2005.

Alain LACOUCHIE : IL OU L’AUTRE. Encres Vives, n° 242.

Avec ce recueil, Alain Lacouchie taille plus que jamais dans le vif des mots : un personnage s’y dresse, « ensanglanté de sa lumière ».

À travers la fiction du « il », le poète avance sur les plaques mouvantes du destin, se heurte aux strates cruelles du monde et de ses propres désirs contradictoires :

« oscillant des pulsions en son autoportrait ».

La lucidité, l’auto-dérision (« renard plutôt que hérisson. Et visible, pourtant »), estompées sur fond de mémoire découragée, peuvent se muer, rageusement, en un baroque fuligineux :

« Il est chat noir au radoub de ses propres routes. »

Sans cesse la romance et la furie se juxtaposent, non sans quelque aveu de lassitude :

« Il en a assez d’abrasifs et se battre ».

Suffit-il au poète d’être le « dramaturge infime » des affres et des écroulements ? Pendant que persiste un rêve de Sud, que s’évapore « la femme d’encens ». Et que surgit la tentation, pour une poésie si âpre et si concrète, d’abolir le combat :

« Laissez-moi fuir l’attente jusqu’au silence ».

©Gilles Lades

in revue Friches, n° 66, printemps 1999.

Alain LACOUCHIE : LES RAPACES, éd. Hautécriture, 1992.

Des rats diversement soumis à des décharges électriques : voilà ce que nous sommes, nous dit Alain LACOUCHIE. Et cela dans un enfer de contraintes :

« Couloir d’ordre / antiseptique »,… « danger d’angles droits »,… « rythme des pistons et des sirènes / dans le pouls des ordinateurs ».

Le dernier poème pourrait d’ailleurs tout aussi bien servir d’exergue :

« Rouge et cendres / c’est la guerre. / Rats et sang / c’est la guerre, la rage et le soufre ».

Dans cette forge à satires — et chaque poème en est une, contrainte au fantastique : « Ces notables boursouflés et écailleux crachent », — dans cette fresque d’un pessimisme violent, l’homme est mis à l’épreuve d’une universelle centrifugeuse, comme s’il devait épuiser toutes les formes de l’abjection pour espérer — un jour — renaître :

« des hyènes sardoniques broient la mort des amoureux
en branches d’ébènes,
et l’anodine poussière de leurs cadavres
est désagrégée par la sauvagerie des canons militaires
».

Les rats, inspirateurs et acteurs, envahissent impitoyablement cette parade rimbaldienne et goyesque, maculent toute l’œuvre humaine, économique, politique, artistique.

Le négatif, seul sur la scène, entre un Sisyphe dont « l’escalier n’a pas d’écho » et une Venise absolument décadente, traduit par sa seule insistance l’intuition de ce qui aurait pu être ou pourrait être. De cela, pas d’aveu, si ce n’est, en filigrane, des mots plus tendres : « entrailles d’absences », ou un regard d’affection sur « des ouvriers élimés d’indifférence ».

Et, le livre refermé sur cette voix rauque, revient le mot de Rimbaud : « Le poète, horrible travailleur ».

©Gilles Lades

in revue Friches, n° 43, été 1993.

Rue prends-y-garde, Ballade pour Eloïse et Abélard, Michel-François Lavaur, éd. Traces.

Avec ce petit ouvrage « fait-main » comme à l’habitude, Michel-François Lavaur nous conte l’histoire d’Eloïse et Abélard. Seize pages denses ornées de dessins afin de satisfaire au texte manuscrit qui se souvient des scribes et des enlumineurs. En toute modestie, Lavaur nous entraîne au pays des amants magnifiques que leur imprudente liaison exposa à la vindicte publique avec les conséquences que l’on sait.

Homme d’église ou homme des champs, noble ou roturier, l’individu mâle est conçu pour la procréation et le bel amour qui unit Abélard à la tendre Eloïse n’aurait été qu’une idylle banale sans l’intervention des autorités ecclésiastiques qui châtrèrent le pauvre homme comme un vulgaire matou… Quant à Eloïse…

Agir de la sorte requiert un sens aigu de l’intolérance et Lavaur profite de l’occasion pour dénoncer… « les pieds estropiés des chinoises, / les cous étirés des femmes girafes, / les excisées, les infibulées, / battues, vendues, violées, / rossées, forcées, asservies, / tuées, prostituées… »

Lavaur a beau prédire : « Vienne le temps des humains responsables », il semble que ce soit là vœu de poètes qui, décidément, ne sont pas des gens sérieux.

©Jean Chatard

Note de lecture in Le Mensuel littéraire et poétique, n° 354, novembre 2007

Le Mangeur de lune, Jean-Pierre Lesieur, éd. Lac et Lande/Comme en poésie.

Avec pour sous-titre « Dérisoire journal d’un petit poète », cet ouvrage débute à la naissance de l’auteur, le 2 octobre 1935, et se termine curieusement en 1991, alors que depuis cette date (et encore aujourd’hui), Jean-Pierre Lesieur a multiplié les interventions dans le domaine poétique et mené à bien l’aventure de sa revue trimestrielle Comme en poésie (près de 30 numéros parus).

Le Mangeur de lune retrace donc, par le biais de poèmes et de notes de circonstance, plus d’un demi-siècle de l’existence d’un jeune garçon, puis d’un jeune homme que la conjoncture dans laquelle il évoluait ne prédisposait guère à la poésie et qui devint, à force de ténacité et de courage, le personnage que l’on sait. Issu d’un milieu défavorisé, il dut, très tôt, faire face à la misère et à la solitude. Plusieurs textes font référence à ces années difficiles où il se battit pour survivre en tant qu’individu et que créateur. Le tout ponctué par des poèmes directement inspirés de ces temps laborieux. Éternel adolescent malgré les années qui défilent (Le Petit Plus, Mon papa m’a dit), Jean-Pierre Lesieur est demeuré fragile, idéaliste, proche de la sensiblerie et des contes de Noël qu’il crée de toutes pièces en s’efforçant d’y croire, malgré tout.

Égal à lui-même, se réfugiant dans l’humour ou le drame, il mélange habilement la vulgarité du quotidien (« enculeur de mouches », « Pendant ce temps-là / ma femme baisait / avec un pharmacien ») et d’autres images, plus sophistiquées mais proches, dans tous les cas, du petit peuple de Paris qu’il fustige autant qu’il vénère. C’est cet ensemble qui donne à sa poésie une vigueur et une gouaille à l’emporte-pièce, capables de nous émouvoir et parfois de nous désarçonner par une mélancolie « bon enfant » où le paupérisme se taille une belle part et la poésie une tranche de vie.

©Jean Chatard

Note de lecture in Le Mensuel littéraire et poétique, n° 348, mars 2007

Béatrice LIBERT : Être au monde (Collection Clepsydre, éditions de la Différence, 47 rue de la Villette 75019 Paris) et Alphabet blanc (La Porte, éd. – Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin – 02000 Laon).

Ce recueil de 90 pages, Être au monde, s’ouvre sur un long poème, « Aube », dans lequel on retrouve avec un plaisir égal le style maîtrisé de Béatrice Libert où le matin qui « coule sur nos peaux » s’installe sur la terre.

« Il emprunte les voies allantes
la rémige du canal
la couleuvre du rail
la longue langue des chemins
la flèche de mon désir
et celle du poème qui pose son visage
contre celui du jour ».

Poète de la clarté et de la tendresse, poète femelle en ses élans, Béatrice Libert parle de l’enfance avec cette force féroce de louve où l’intime devient miel et où l’épiderme ploie sous la caresse.

Elle rassemble ici plusieurs textes publiés en revues ou en des fascicules. Ainsi « L’Heure blanche » fit l’objet d’une parution dans « Encres vives » (de Michel Cosem) et « Deux enfances » dans « Le Poémier de Plein Vent » (d’Annie Delpérier).

Si Béatrice Libert sait privilégier, dans ses poèmes, et l’amante et la femme, elle peut également donner à son rôle de mère des déclinaisons superbes.

 » … Cependant, il m’arrive encore d’héberger, en mon
ventre, le souvenir de tes frissons et de tes fièvres.
À ton tour, maintenant, de me porter en toi, dans tes
yeux, par ta voix… »

L’amour, chez Béatrice Libert, est une nécessité poétique qu’elle porte en elle et ne la quittera jamais.

Avec un nouveau petit livre, Alphabet blanc, Béatrice Libert brosse un tableau hivernal où la légèreté des flocons de neige rejoint la légèreté de style d’un poète inspiré pour qui les mots servent à gravir les marches d’un toujours possible bonheur. La poésie est du voyage et l’amour un laisser-passer.

« Nous aimerions voler
pour que nos pas
n’entachent pas la neige ».

©Jean Chatard

Note de lecture in Les Hommes sans épaules, n° 19, premier semestre 2005.